Le charbon pourrait-il être le Saint Graal de la nanotechnologie électronique ?

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En transformant le charbon en isolant bidimensionnel, des chercheurs ont mis au point des transistors à l’échelle nanométrique offrant de meilleures performances.

En nanotechnologie, le Graal est l’électronique 2D : des dispositifs d’une épaisseur d’un ou deux atomes. Cependant, alors que de nombreuses recherches se concentrent sur le développement de matériaux semi-conducteurs, un aspect moins discuté est la nécessité d’isolants ultraminces qui peuvent fonctionner efficacement à l’échelle nanométrique. Ces isolants ultraminces sont essentiels pour maintenir l’intégrité électrique entre les composants étroitement espacés, éviter les fuites de courant indésirables et garantir la fiabilité globale du dispositif.

Charbon.

Charbon. Image utilisée avec l’aimable autorisation de l’EPA

Récemment, des chercheurs de l’Université de l’Illinois ont cherché à résoudre ce défi à partir d’une source improbable : le charbon. Pourquoi le charbon présente-t-il autant de promesses dans ce domaine et comment les chercheurs ont-ils exploité ce potentiel ?

Les isolants pour la nanoélectronique 2D

Un des principaux défis de la nanoélectronique 2D est le développement d’isolants capables de résister à des champs électriques élevés sans se désintégrer, tout en étant suffisamment minces pour s’insérer dans les architectures de plus en plus petites des nanoélectroniques modernes. De plus, ces matériaux doivent présenter une épaisseur uniforme et être exempts de défauts pour éviter la dégradation des performances.

Malheureusement, les isolants traditionnels tels que le dioxyde de silicium présentent des limitations quant à leur minceur sans perdre leurs propriétés isolantes. Cela a conduit les chercheurs à explorer des matériaux alternatifs qui répondent aux exigences strictes des électroniques de nouvelle génération.

Étonnamment, le charbon, un matériau traditionnellement associé à la production d’énergie et aux problèmes environnementaux, émerge comme une solution potentielle.

Fuites de la grille du transistor par rapport à l'épaisseur équivalente de l'oxyde.

Fuites de la grille du transistor par rapport à l’épaisseur équivalente de l’oxyde. Image utilisée avec l’aimable autorisation de Illarionov et al.

Le charbon contient du carbone, un élément polyvalent qui est à la base de nombreux matériaux avancés, notamment le graphène. Des techniques de traitement innovantes permettent de transformer le charbon en dérivés du carbone adaptés aux isolants ultraminces. Ces dérivés du carbone possèdent les propriétés désirées pour la nanoélectronique : ils peuvent être atomiquement minces, sont électriquement robustes et peuvent être produits avec une grande uniformité et une faible densité de défauts.

De plus, l’utilisation du charbon pour la nanoélectronique pourrait offrir un moyen respectueux de l’environnement pour réutiliser cette ressource naturelle abondante, en alignant les avancées technologiques sur les objectifs de durabilité.

Le charbon en tant qu’isolant

Récemment, des chercheurs ont mis au point une méthode pour transformer le charbon en couches isolantes ultra-minces et hautement efficaces destinées à être utilisées dans la nanoélectronique.

Ils ont axé leurs recherches sur la conversion du charbon en points de carbone, qui sont ensuite utilisés pour créer des nanomembranes de carbone atomiquement minces. Ces membranes, d’une épaisseur de seulement 1 à 2 couches atomiques, sont dérivées du charbon de haute pureté extrait de domaines de carbone sp2 aromatiques de taille angström ou nanométrique. Les points de carbone, d’une épaisseur moyenne de 0,42 nm, sont assemblés en une quasi-monocouche par dépôt par centrifugation sur un substrat de plaquette. Ce processus permet d’obtenir des films dont l’épaisseur fluctue uniformément de 1 à 2 couches atomiques.

Schéma du transistor à base de charbon et caractéristiques de sortie du dispositif.

Schéma du transistor à base de charbon et caractéristiques de sortie du dispositif. Image utilisée avec l’aimable autorisation de An et al.

Un aspect clé de cette recherche est l’évolutivité et l’uniformité de la production de films. Le processus permet de créer des films de carbone autoportants de grande surface, couvrant des plaquettes de 3 pouces avec une intensité diélectrique supérieure à 20 MV cm−1 et une densité de courant de fuite inférieure à 10−4 A cm−2. Ces films présentent une résistance mécanique impressionnante avec un module de Young d’environ 400 ± 100 GPa.

Avec une épaisseur totale d’environ 2,4 nm, ces films ont été intégrés en tant que diélectriques de grille supérieure dans des transistors en graphène. Le dispositif obtenu présente une conductance à l’état passant supérieure à 250 μS μm−1​​, une transconductance 10 fois meilleure et une hystérésis réduite par rapport aux diélectriques traditionnels.

Impact sur la nanoélectronique

La recherche pourrait avoir un impact significatif sur l’industrie de la nanoélectronique. Les films de carbone amorphes quasi-2D créés à partir de points de carbone dérivés du charbon présentent des propriétés diélectriques exceptionnelles, ce qui les rend idéaux pour une utilisation dans les transistors et les mémoires résistantes. De plus, cette approche permet de réutiliser une source d’énergie fossile traditionnelle de manière durable et économique.

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